Le travail des coroners - Comprendre la mort pour préserver la vie - Chroniques | Fédération des coopératives funéraires du Québec

Le travail des coroners - Comprendre la mort pour préserver la vie

Même si on entend régulièrement parler du travail des coroners dans l’actualité, leur rôle est encore méconnu. Ils sont pourtant à l’origine de nombreux changements dans notre société. Qui sont-ils, et que font-ils exactement ?

Ils sont aujourd’hui une centaine à se partager la garde de l’ensemble du territoire québécois. Certains coroners exercent leurs fonctions à temps plein, mais la plupart d’entre eux le font en marge de leur vie professionnelle de médecin, d’avocat ou de notaire. Ils sont appuyés par une coroner en chef qui chapeaute une cinquantaine d’employés répartis dans deux bureaux administratifs et deux morgues, à Québec et à Montréal. C’est ce qu’on nomme couramment le Bureau du coroner.

Les coroners interviennent principalement dans les cas de décès violents, obscurs ou survenus dans un contexte de négligence, ce qui représente environ 5 500 décès par année. Suicide, homicide, accident de la route, noyade, intoxication, erreur médicale : le champ d’intervention est large et les défis, nombreux.

Deux rôles à assumer : investigation et prévention

Des deux grands rôles des coroners, on connaît surtout le premier : investiguer les décès. Avec rigueur, indépendance et impartialité, ils s’emploient à déterminer l’identité de la personne décédée ainsi que la date, le lieu, les circonstances et les causes probables de son décès. Ils ont aussi une mission de prévention, moins connue, mais non moins importante. Au fil des ans, leurs recommandations ont donné lieu à une multitude de changements, comme l’interdiction du cellulaire au volant et l’obligation de chausser son véhicule de pneus d’hiver durant la saison froide. Les coroners contribuent aussi à la recherche en recueillant des données qui servent à étudier différents phénomènes de mortalité.

La plupart du temps, les coroners procèdent au moyen d’une investigation, c’est-à-dire qu’ils rassemblent les renseignements dans le cadre d’un processus privé. Dans les cas qui suscitent un intérêt collectif, le coroner en chef peut aussi ordonner une enquête. Les faits sont alors présentés au coroner à l’occasion d’audiences qui se tiennent généralement dans un palais de justice. Dans les deux cas, au terme du processus, le coroner produit un rapport dans lequel il présente ses conclusions. Ce rapport est public et peut être remis à toute personne qui en fait la demande, y compris les représentants des médias. Fait à noter : le coroner ne peut se prononcer sur la responsabilité civile ou criminelle d’une personne, ce rôle étant dévolu aux tribunaux.

Plusieurs partenaires

Tout au long de leurs investigations et de leurs enquêtes, les coroners peuvent compter sur l’appui de plusieurs experts et partenaires : policiers, médecins, pathologistes judiciaires, toxicologues, experts en balistique, etc. Ce sont les résultats de leurs analyses qui permettent de déterminer les causes et les circonstances des décès. Les coroners tiennent aussi compte des rapports d’organismes gouvernementaux, dont ceux de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST), le cas échéant.

La durée moyenne d’une investigation est de douze mois. Il faut savoir que le coroner ne peut rédiger son rapport avant d’avoir obtenu tous les renseignements et tous les résultats d’analyse nécessaires, ce qui peut prendre plusieurs mois. Il faut aussi compter un certain temps pour la gestion administrative du dossier, une étape qui permet notamment de colliger des données pour la recherche et de parfaire les recommandations.

Le coroner qui prend avis d’un décès a autorité sur le corps et peut ordonner toutes les analyses qu’il juge appropriées, une autopsie par exemple. Le corps est ensuite remis à la maison funéraire choisie par la famille du défunt. Pour différentes raisons, il arrive que la famille ne soit pas en mesure de prendre en charge la dépouille. C’est alors le Bureau du coroner qui, au terme d’un processus rigoureux, l’inhume dans un cimetière. Le défunt a son propre cercueil qui peut être géolocalisé au besoin. Il ne faut pas confondre la prise en charge de la dépouille et la succession de la personne décédée, deux processus complètement distincts.

« Pour la vie ! »

Le slogan du Bureau du coroner peut étonner, mais il est pourtant bien représentatif de la réalité. Chaque jour, les coroners apportent des réponses aux familles et aux proches des personnes décédées. Ils mettent en lumière des phénomènes de mortalité et les risques qu’ils représentent pour la population. Ils formulent des recommandations dans le but de prévenir d’autres décès évitables. Plus que jamais, le travail des coroners en est un pour la vie.

Pascale Descary
Avocate et coroner en chef

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Pour en savoir davantage sur la mission des coroners : coroner.gouv.qc.ca

À propos de l’auteure

Avocate et psychoéducatrice de formation, Me Pascale Descary agit à titre de coroner en chef du Québec depuis le 5 mars 2018, mandat confié par le Conseil des ministres. Avant de se joindre au Bureau du coroner, Me Descary a exercé la fonction d’ombudsman de l’Université de Montréal.

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